La décarbonation est au cœur des politiques environnementales et énergétiques. Elle représente un ensemble d'actions visant à réduire les émissions de carbone, principalement sous forme de dioxyde de carbone (CO₂), pour atténuer le changement climatique. Cet article explore la décarbonation, son importance pour les entreprises, et les solutions disponibles Pour en savoir plus sur comment décarboner votre entreprise, veuillez nous contacter.
1. Pourquoi la décarbonation est-elle cruciale ?
Le réchauffement climatique est désormais attribué avec certitude à l’activité humaine. Selon le GIEC, les émissions de gaz à effet de serre (GES), en particulier le dioxyde de carbone (CO₂), sont les principales responsables de ce dérèglement. Les énergies fossiles sont à elles seules à l’origine de près de 75 % des émissions mondiales de GES et de 90 % des émissions de CO₂ liées aux activités humaines (industrie, transport, agriculture, bâtiment, énergie…).
La décarbonation désigne l’ensemble des transformations mises en œuvre pour réduire durablement ces émissions. Elle implique une transition profonde des systèmes de production, du mix énergétique et des usages, afin de limiter drastiquement le recours aux énergies fossiles. L’objectif est double : parvenir à une économie bas carbone et préparer les conditions de la neutralité carbone, c’est-à-dire l’équilibre entre les émissions résiduelles et la capacité de la planète à les absorber (puits naturels ou solutions technologiques comme le captage et le stockage du CO₂). Autrement dit, il ne peut y avoir de neutralité carbone sans décarbonation en amont.
Les données scientifiques sont sans appel. D’après le GIEC, pour maintenir le réchauffement climatique sous la barre des +1,5 °C, les émissions mondiales doivent diminuer de 45 % d’ici 2030 (par rapport à 2010) et atteindre la neutralité carbone en 2050. Pourtant, selon l’Agence internationale de l’énergie, les émissions mondiales de CO₂ liées à l’énergie ont encore atteint 37,4 gigatonnes en 2023, un record. Sans réduction massive, les conséquences seront graves : sécheresses, inondations, incendies, pertes agricoles et crises sanitaires. L’Accord de Paris de 2015, signé par 195 pays, impose justement de renforcer régulièrement les politiques publiques et les plans d’action climat. En France, cette ambition se traduit notamment par la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
La décarbonation n’est plus une action volontaire : elle devient une exigence stratégique et réglementaire pour les organisations. Elle conditionne :
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Compétitivité et performance économique : réduction des coûts énergétiques, accès facilité aux financements durables (green bonds, prêts verts), anticipation de la hausse du prix du carbone.
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Réputation et relation client : les chaînes d’approvisionnement internationales imposent désormais des exigences bas carbone à leurs partenaires.
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Attractivité des talents : 70 % des jeunes de la génération Z souhaitent travailler pour des entreprises engagées sur les sujets ESG (étude BCG, 2023).
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Accès à de nouveaux marchés et résilience : avec le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM), les produits à forte intensité carbone sont progressivement pénalisés.
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Préservation de l’environnement et des ressources : limitation de la pollution de l’air, de l’acidification des océans, de la pression sur l’eau et de la dégradation des écosystèmes.
Cette transformation est soutenue par un cadre réglementaire précis :
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Fit for 55 : l’Union européenne vise une réduction de 55 % des émissions de GES d’ici 2030.
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SNBC (Stratégie Nationale Bas Carbone) : feuille de route française pour atteindre la neutralité carbone en 2050, avec des budgets carbone par secteur.
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CORSIA : mécanisme de compensation obligatoire des émissions pour l’aviation internationale.
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ETS européen (système d’échange de quotas d’émission) : les entreprises les plus polluantes doivent acheter des droits d’émission.
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Taxonomie européenne et CSRD : obligations pour les grandes entreprises de mesurer et publier leurs impacts environnementaux.
À terme, toute entreprise sera évaluée sur sa capacité à s’aligner sur une trajectoire bas carbone. La décarbonation devient donc un levier incontournable pour anticiper les risques réglementaires et sécuriser son activité.
2. Les leviers techniques pour la décarbonation de l’industrie
Pour atteindre les objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris et les réglementations européennes, le secteur industriel doit transformer en profondeur ses procédés et son mix énergétique. Responsable d’environ 20 % des émissions mondiales de CO₂ liées à l’énergie (AIE, 2023), l’industrie constitue une priorité absolue dans la transition bas carbone. Plusieurs leviers techniques peuvent être activés :
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Audit énergétique et optimisation des procédés de production : la première étape consiste à réaliser un audit énergétique complet afin de mesurer avec précision la consommation et repérer les pertes. Sur cette base, des actions ciblées peuvent être mises en place : modernisation des équipements, amélioration de l’efficacité des lignes de production, récupération et réutilisation de la chaleur, ou encore intégration de l’éco-conception. Ces démarches sont déjà efficaces : l’usine Michelin de Cholet, par exemple, a réduit de 20 % sa consommation grâce à la récupération de chaleur et à un pilotage intelligent des machines.
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Passage aux énergies renouvelables (solaire, éolien, biomasse) : la substitution progressive des énergies fossiles par des énergies renouvelables est un levier central. Les entreprises peuvent produire ou acheter de l’électricité issue du solaire ou de l’éolien, recourir à la biomasse ou au biogaz pour la chaleur et l’électricité, ou encore utiliser la géothermie et les réseaux de chaleur bas carbone. En 2023, L’Oréal a annoncé que l’ensemble de ses sites en Europe seraient alimentés à 100 % par de l’électricité renouvelable grâce à des contrats d’achat d’électricité (PPA).
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Captage, stockage et valorisation du CO₂ (CCS/CCU) : certaines industries lourdes (sidérurgie, ciment, chimie) ne peuvent pas supprimer toutes leurs émissions. Les technologies de CCS (Carbon Capture and Storage) permettent de capter le CO₂ à la source puis de l’injecter dans des gisements géologiques pour un stockage à long terme. Le CCU (Carbon Capture and Utilization) suit une logique complémentaire en réutilisant le CO₂ capté pour produire du méthanol, des carburants synthétiques ou des matériaux recyclés. Parmi les projets phares : Northern Lights en Norvège, qui prévoit de stocker plusieurs millions de tonnes de CO₂ sous la mer du Nord dès 2025, ou le pilote d’ArcelorMittal à Dunkerque.
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Hydrogène bas carbone (électrolyse verte, filières système gaz) : l’hydrogène est un levier clé pour les secteurs difficiles à électrifier. L’hydrogène vert, produit par électrolyse à partir d’électricité renouvelable, et l’hydrogène bas carbone, issu de procédés industriels couplés au captage du CO₂, permettront de remplacer progressivement le charbon, le gaz ou certains procédés chimiques. La France prévoit d’investir 6,5 milliards d’euros d’ici 2030 pour développer des “vallées de l’hydrogène” et structurer la filière.
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Digitalisation et maintenance prédictive pour réduire les gaspillages : la digitalisation des procédés industriels offre des gains significatifs. Les capteurs connectés, l’intelligence artificielle et les jumeaux numériques (modèles virtuels qui reproduisent en temps réel un objet ou un processus physique, afin d’en optimiser l’usage, l’entretien ou la performance) permettent de suivre en temps réel les consommations, de simuler des optimisations et d’anticiper la maintenance. Selon McKinsey (2023), ces technologies peuvent réduire jusqu’à 15 % la consommation d’énergie dans les usines en limitant les arrêts non planifiés et les gaspillages.
3. Captage, stockage et valorisation du CO₂
Le CCS (Carbon Capture and Storage), ou captage et stockage du carbone, regroupe l’ensemble des étapes permettant d’intercepter le dioxyde de carbone (CO₂) émis par les sites industriels ou les centrales électriques avant qu’il ne soit relâché dans l’atmosphère. Reconnue par l’Agence internationale de l’énergie comme un levier indispensable pour atteindre les objectifs climatiques, cette technologie est particulièrement adaptée aux secteurs où les émissions sont difficiles à éliminer (sidérurgie, cimenterie, chimie, production d’électricité à partir de combustibles fossiles).
Principe et fonctionnement des installations CCS
Le processus repose sur trois étapes principales :
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Captage : lors de la combustion, le CO₂ représente seulement 5 à 15 % des gaz émis. Il doit donc être séparé et concentré. Trois approches existent :
- Post-combustion : extraction du CO₂ directement dans les fumées grâce à des solvants chimiques (amines), des membranes ou des procédés cryogéniques. Cette méthode permet de capter jusqu’à 90 % du CO₂.
- Pré-combustion : transformation du combustible fossile en gaz de synthèse (mélange CO + H₂) ; le CO est ensuite converti en CO₂, séparé, et l’hydrogène produit peut servir comme carburant propre.
- Oxy-combustion : combustion réalisée dans de l’oxygène pur. Les fumées produites sont très riches en CO₂ et donc faciles à capturer.
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Transport : une fois capté et purifié, le CO₂ est compressé puis acheminé par pipeline à haute pression (solution la plus courante) ou, selon les besoins, par navires et camions spécialisés.
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Stockage géologique : le CO₂ est injecté à plus de 800 mètres de profondeur, sous forme supercritique, dans des gisements de pétrole/gaz épuisés, des aquifères salins profonds ou des veines de charbon non exploitées. Ces sites font l’objet d’une surveillance de long terme pour garantir leur étanchéité.
Lorsque le CO₂ est réutilisé plutôt que stocké, on parle de CCU (Carbon Capture and Utilization). Cette voie vise à transformer le CO₂ en produits utiles : méthanol, e-carburants, matériaux de construction ou intrants chimiques.
Exemples de projets industriels en France et en Europe
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Northern Lights (Norvège) : mené par Equinor, TotalEnergies et Shell, ce projet prévoit dès 2025 le transport et le stockage de plusieurs millions de tonnes de CO₂ sous la mer du Nord, via une infrastructure ouverte aux industriels européens.
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Porthos (Pays-Bas) : situé à Rotterdam, il stockera 2,5 millions de tonnes de CO₂ par an à partir de 2026 dans d’anciens gisements offshore, au bénéfice des raffineries et producteurs d’hydrogène.
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ArcelorMittal – Dunkerque (France) : pilote de capture sur un haut-fourneau, avec transformation du CO₂ en carburants de synthèse. Projet soutenu par l’ADEME et France 2030.
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Sleipner (Norvège) : depuis 1996, environ 1 Mt de CO₂ est injectée chaque année dans un aquifère salin profond, sans fuite détectée à ce jour. Référence mondiale en matière de stockage sécurisé.
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Projet Lacq (France) : pilote mené par Total entre 2010 et 2013, avec 51 000 tonnes de CO₂ injectées à 4 500 m de profondeur, renforçant l’expertise française sur le CSC.
Défis techniques, coûts et acceptation locale
Malgré son potentiel, la filière CCS/CCU doit encore franchir plusieurs obstacles :
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Des technologies coûteuses à industrialiser : le captage représente jusqu’à 70 % du coût d’un projet, et son intégration à des sites existants est complexe.
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Des coûts élevés : l’AIE estime entre 80 et 150 €/tonne de CO₂ évitée, ce qui rend les projets dépendants de financements publics et de mécanismes de soutien (CCfD, Fonds innovation).
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Le défi du passage à l’échelle : les pilotes comme Sleipner et Snøhvit ont prouvé la faisabilité, mais restent à taille limitée. L’enjeu est de gérer à terme des centaines de millions de tonnes sur plusieurs décennies, avec des garanties solides de sécurité.
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Une acceptabilité sociale fragile : certains projets ont été annulés faute de concertation. Transparence, surveillance et implication des territoires sont essentielles.
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Un cadre réglementaire et financier à consolider : la filière nécessite un environnement stable et lisible, appuyé par des incitations (CBAM, certificats CO₂, fonds de transition juste).
Valorisation du CO₂ (méthanol, e-carburants)
Au-delà du stockage, la valorisation du CO₂ ouvre la voie à une économie circulaire du carbone. Le CO₂ capté peut être combiné avec de l’hydrogène bas carbone pour produire du méthanol, utilisé comme carburant ou matière première chimique, ou des e-carburants (e-kérosène, e-diesel) destinés aux secteurs difficiles à électrifier comme l’aviation et le maritime.
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Le projet Haru Oni au Chili (Siemens Energy et Porsche) vise la production de 130 000 litres d’e-fuel par an à partir de 2026.
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Le programme allemand Kopernikus P2X explore la production industrielle de méthanol et d’e-carburants à partir de CO₂ recyclé.
Ces solutions restent limitées par des coûts élevés, un rendement énergétique faible (fort besoin en électricité renouvelable) et des impacts variables selon l’usage final (le CO₂ peut être réémis). Mais elles constituent un complément stratégique au stockage et un levier d’innovation pour atteindre les trajectoires net zéro.
4. La décarbonation de l’économie et des entreprises
La décarbonation des entreprises et de l’économie dans son ensemble repose sur une série de leviers stratégiques et opérationnels. Pour réussir cette transformation, il ne suffit pas de réduire ses propres émissions directes : il s’agit d’embarquer toute la chaîne de valeur, de mobiliser des financements adaptés et de renforcer la transparence des engagements.
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Réalisation d’un bilan GES et plan de réduction : la réalisation d’un bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES) constitue le point de départ indispensable de toute stratégie de décarbonation. Ce diagnostic couvre les émissions directes (scope 1), indirectes liées à l’énergie (scope 2), ainsi que les émissions induites sur l’ensemble de la chaîne de valeur (scope 3), souvent majoritaires. En France, le bilan GES réglementaire est obligatoire pour les entreprises de plus de 500 salariés (ou 250 dans le secteur public) et doit être mis à jour tous les quatre ans (trois ans pour les entités publiques), sous peine de sanctions. Mais au-delà des obligations, ce diagnostic permet de hiérarchiser les postes émissifs, d’identifier des marges de réduction et de définir une trajectoire compatible avec l’objectif de neutralité carbone à 2050. Un plan efficace repose sur des objectifs chiffrés (SBTi, ISO 14068), des actions sectorielles ciblées (efficacité énergétique, mobilité durable, achats responsables) et un suivi annuel des indicateurs. Il constitue aussi un levier de mobilisation interne et externe en engageant collaborateurs, fournisseurs et parties prenantes.
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Stratégies de sourcing bas carbone et supply chain verte : la décarbonation dépasse les sites de production pour concerner l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Dans de nombreuses entreprises, les émissions du scope 3 représentent plus de 70 % de l’empreinte carbone totale. Les leviers d’action incluent le choix de fournisseurs engagés dans des démarches bas carbone, l’intégration de critères environnementaux dans les appels d’offres (éco-conception, matériaux recyclés, labels), la révision des schémas logistiques (massification, fret ferroviaire ou fluvial, électrification des flottes) et le développement de l’économie circulaire (réutilisation, reconditionnement, valorisation). Certaines grandes entreprises exigent déjà de leurs fournisseurs un bilan carbone ou un alignement SBTi, ce qui tire l’ensemble des filières vers des modèles plus durables. Une supply chain bas carbone devient ainsi un facteur de compétitivité, de conformité réglementaire et de résilience face aux tensions géopolitiques, aux hausses du prix du carbone ou aux risques climatiques.
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Financement et mécanismes de marché (certificats, marché carbone, green bonds) : réduire ses émissions suppose souvent des investissements importants (modernisation industrielle, rénovation des bâtiments, technologies propres). Pour les financer, plusieurs leviers existent : les green bonds (obligations vertes) ou les prêts verts permettent de mobiliser des capitaux spécifiquement dédiés à des projets à impact environnemental. Des aides publiques (plan France 2030, ADEME) soutiennent aussi l’innovation bas carbone. Parallèlement, les mécanismes de marché carbone jouent un rôle structurant : l’EU ETS impose un plafond d’émissions aux secteurs les plus polluants, les entreprises devant acheter ou vendre des quotas en fonction de leur performance. Le CBAM (mécanisme d’ajustement carbone aux frontières) introduit un prix du carbone sur les importations de matériaux fortement émetteurs, afin de prévenir les distorsions de concurrence. Enfin, sur le marché volontaire, les entreprises peuvent financer des projets certifiés de réduction ou de séquestration d’émissions, contribuant ainsi à des actions climatiques au-delà de leur propre périmètre.
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Communication RSE et labels bas carbone (ISO 14064, Science Based Targets) : dans un contexte où les investisseurs, consommateurs et régulateurs exigent plus de transparence, la communication sur la stratégie climat doit être mesurée, vérifiable et alignée sur des standards reconnus. Parmi les référentiels de référence figurent le GHG Protocol et le BEGES réglementaire en France. La norme ISO 14064 apporte un cadre robuste de quantification, suivi et vérification. L’initiative SBTi permet aux entreprises de fixer des objectifs alignés sur une trajectoire 1,5 °C, devenant ainsi un signe fort de crédibilité à l’international. En parallèle, le Label bas carbone français valorise des projets locaux (agricoles, forestiers, énergétiques) ayant démontré leur capacité à réduire ou séquestrer du CO₂ de manière additionnelle et vérifiable. Une communication RSE structurée autour de ces référentiels renforce la confiance des parties prenantes et constitue un véritable avantage concurrentiel.
5. Obligations réglementaires et soutien public
La décarbonation des entreprises est encadrée par un ensemble d’obligations légales, de dispositifs de financement et d’échéances précises, qui visent à accélérer la transition tout en soutenant les acteurs économiques.
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Entreprises concernées en France (taille, secteurs) : selon l’article L.229-25 du Code de l’environnement, les entreprises de plus de 500 salariés doivent réaliser un bilan GES, tandis que les collectivités de plus de 50 000 habitants, les établissements publics de plus de 250 agents et les services de l’État y sont soumis tous les trois ans. Certaines sociétés sont également concernées via la déclaration de performance extra-financière (DPEF), obligatoire pour celles dépassant deux des trois seuils suivants : 20 M€ de total bilan, 40 M€ de chiffre d’affaires net ou 500 salariés. Ce reporting doit inclure les impacts environnementaux, les risques climatiques et les mesures de réduction. Les secteurs fortement émetteurs (industrie lourde, énergie, bâtiment, transports, agriculture) sont par ailleurs soumis au système EU ETS (échange de quotas d’émissions). Enfin, la directive CSRD, applicable dès 2025, élargira ces obligations à plus de 50 000 entreprises européennes, y compris des PME sous-traitantes ou exportatrices.
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Dispositifs de soutien (ADEME, France 2030, subventions européennes) : pour accompagner la transition, plusieurs programmes publics existent. L’ADEME propose diagnostics, outils sectoriels et financements via des appels à projets (« Tremplin pour la transition écologique », « Décarbonation de l’industrie »). Le plan France 2030, doté de 54 Md€, consacre plus de 5 Md€ à la décarbonation industrielle : électrification des procédés, hydrogène bas carbone, biomasse, captage et stockage du CO₂, optimisation énergétique. Ces financements passent principalement par Bpifrance et l’ADEME. Au niveau européen, le Fonds pour l’innovation finance des projets de grande ampleur (CCS/CCU, renouvelables, carburants alternatifs), tandis que des programmes comme Horizon Europe, le Pacte vert ou le Mécanisme pour l’interconnexion en Europe complètent ce soutien.
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Exigences et échéances des bilans GES obligatoires : le bilan doit être réalisé selon des méthodes reconnues par le ministère de la Transition écologique (méthode réglementaire BEGES ou Bilan Carbone® de l’ADEME). Il couvre a minima les scopes 1 et 2 (émissions directes et liées à l’énergie) et tend de plus en plus à inclure le scope 3 (chaîne d’approvisionnement, usage des produits, déplacements). Depuis 2023, les bilans doivent être publiés sur la plateforme bilans-ges.ademe.fr, accompagnés d’un plan de transition détaillant les actions de réduction. Ce plan est désormais obligatoire et constitue un outil stratégique d’alignement avec les objectifs de neutralité carbone à 2050. En cas de non-conformité, les entreprises encourent une amende administrative pouvant atteindre 7 500 €.
6. Mécanismes européens : ETS, CBAM et perspectives
Les instruments européens constituent des leviers essentiels pour accélérer la décarbonation, en imposant un prix du carbone aux entreprises européennes comme aux importateurs extra-UE.
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Fonctionnement du système d’échange de quotas d’émission (EU ETS) : mis en place en 2005, l’EU ETS est le premier marché transnational du carbone et reste aujourd’hui le plus important au monde. Il repose sur le principe du cap-and-trade : un plafond global d’émissions est fixé pour les secteurs couverts (production d’électricité, industrie lourde, raffinage, chimie, aviation intra-européenne, et bientôt transport maritime). Ce plafond diminue chaque année afin d’aligner les trajectoires avec les objectifs climatiques de l’UE. Les entreprises reçoivent ou achètent des quotas carbone (EUA – European Union Allowances), chaque quota correspondant au droit d’émettre une tonne de CO₂. Les installations qui émettent moins que leur quota peuvent revendre l’excédent ; celles qui le dépassent doivent acheter des quotas supplémentaires sous peine de sanctions. Ce mécanisme crée une incitation économique directe à réduire les émissions et à investir dans des solutions bas carbone.
Avec le paquet Fit for 55, l’ETS a été renforcé :-
Réduction annuelle du plafond de 4,3 % entre 2024 et 2027, puis 4,4 % à partir de 2028 ;
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Intégration du transport maritime dès 2024 ;
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Création d’un ETS 2 pour les carburants des bâtiments et de la mobilité routière à partir de 2027.
Le prix de la tonne de CO₂ est passé d’environ 5 € en 2017 à plus de 80 € fin 2023, rendant incontournable la réduction des émissions pour les acteurs couverts.
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Impact du CBAM sur les importations carbonées : le CBAM (Carbon Border Adjustment Mechanism), ou mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, est un outil phare du Pacte vert européen. Il vise à éviter les fuites de carbone (délocalisation des activités vers des pays aux normes moins strictes) et à garantir une concurrence équitable avec les producteurs soumis à l’EU ETS. Dans un premier temps, il concerne six secteurs fortement émetteurs : acier, aluminium, ciment, engrais, électricité et hydrogène. Les importateurs doivent déclarer les émissions directes associées aux produits importés et acquérir des certificats CBAM équivalents au prix des quotas ETS.
La mise en œuvre est progressive :-
2023-2025 : phase de transition avec simple obligation de déclaration ;
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janvier 2026 : entrée en vigueur complète, avec achat obligatoire de certificats.
Le CBAM constitue un levier stratégique pour inciter les producteurs extra-européens à décarboner leurs procédés, renforcer la traçabilité carbone des chaînes d’approvisionnement mondiales et protéger l’industrie européenne. À terme, son champ pourrait être élargi à d’autres secteurs, en fonction de l’évolution des négociations internationales et de l’ambition climatique de l’UE.
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FAQ
La décarbonation désigne l’ensemble des actions visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, en particulier le dioxyde de carbone (CO₂), générées par les activités humaines. Elle repose sur des leviers technologiques, organisationnels et comportementaux, et s’applique à tous les secteurs de l’économie. Elle est essentielle pour respecter les engagements climatiques internationaux, comme l’Accord de Paris.
- L’audit énergétique et l’optimisation des procédés industriels,
- Le passage aux énergies renouvelables (solaire, éolien, biomasse),
- Le captage, stockage et valorisation du CO₂ (CCS/CCU),
- L’hydrogène bas carbone,
- La digitalisation, la maintenance prédictive et la réduction des gaspillages.
- Les entreprises de plus de 500 salariés en métropole ou 250 en outre-mer (tous les 4 ans)
- Les collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants (tous les 3 ans)
- Les établissements publics et autres personnes morales de droit public de plus de 250 agents (tous les 3 ans)
- L’État et ses services (tous les 3 ans)
La décarbonation constitue donc une étape indispensable vers la neutralité carbone, mais elle ne suffit pas à elle seule à atteindre cet objectif global.
- Subventions et appels à projets de l’ADEME (chaleur renouvelable, efficacité industrielle, etc.),
- Diag Décarbon’Action : dispositif proposé par l’ADEME et Bpifrance pour aider les PME/ETI à établir un plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
- Financements du plan France 2030 pour l’innovation bas carbone,
- Aides européennes via le Fonds pour l’innovation, Horizon Europe ou le Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE),
- Accès facilité à des financements durables (green bonds, prêts verts) en cohérence avec une stratégie climat claire.
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