Face à l'urgence climatique et au durcissement du cadre réglementaire, les entreprises doivent transformer leur approche de la durabilité. La simple mesure de l'empreinte carbone ne suffit plus. L'heure est au pilotage actif d'une stratégie bas-carbone, matérialisée par un plan de transition climatique robuste. Avec l'entrée en vigueur de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), ce plan devient non seulement un avantage stratégique, mais aussi une obligation de transparence.
Alors, comment construire cette roadmap bas-carbone ? Cet article vous guide à travers les enjeux, les étapes clés de la construction de votre plan de décarbonation, les outils indispensables et les bonnes pratiques pour aligner votre stratégie avec les exigences de la trajectoire CSRD.
Pour naviguer efficacement dans le nouveau paysage de la durabilité d'entreprise, il est crucial de maîtriser deux concepts centraux: le plan de transition et la directive CSRD.
Un plan de transition est bien plus qu'une simple déclaration d'intention. C'est une feuille de route stratégique qui détaille les objectifs, les actions concrètes et les ressources (financières, humaines) qu'une organisation déploie pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES). Son but est d'aligner son modèle d'affaires avec une économie bas-carbone, en réponse aux objectifs climatiques mondiaux comme l'Accord de Paris. Le plan de transition, demandé dans le cadre de la CSRD, s'inscrit dans les obligations de reporting extra-financier des entreprises. Il doit être conforme aux normes européennes ESRS, et en particulier à l’ESRS E1, dédié au changement climatique. L'objectif est d'assurer que les entreprises mettent en place des stratégies compatibles avec la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C, conformément à l'Accord de Paris.
La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) est la nouvelle réglementation européenne qui succède à la NFRD (Non-Financial Reporting Directive). Elle vise à rehausser la qualité, la fiabilité et la comparabilité des informations de durabilité publiées par les entreprises.
Son déploiement est progressif :
Dès 2025 (sur les données de 2024), elle s'applique aux grandes entreprises de plus de 500 salariés déjà soumises à la NFRD.
Dès 2026 (sur les données de 2025), elle concernera les autres grandes entreprises européennes qui dépassent deux des trois seuils suivants : 250 salariés, 50 M€ de chiffre d'affaires ou 25 M€ de bilan.
Dès 2027 (sur les données de 2026), ce sera au tour des PME cotées en bourse, avec une possibilité de report de deux ans.
Il est important de noter que l'application de ces réglementations peut être affectée par des textes législatifs nationaux, comme le projet de loi omnibus. Ce type de loi peut simplifier ou modifier le processus d'adoption et d'entrée en vigueur des directives européennes transposées en droit national, impactant potentiellement les délais et les modalités de leur mise en œuvre pour les entreprises concernées.
Le lien entre ces deux éléments est direct. La CSRD, via sa norme thématique ESRS E1 sur le changement climatique, impose aux entreprises de communiquer de manière transparente sur leur plan de transition. Les normes ESRS, élaborées par l'EFRAG, définissent les informations que les entreprises doivent rapporter. La CSRD pousse les entreprises à aligner leur plan de transition avec leur plan financier, créant un lien direct entre leurs engagements environnementaux et leurs objectifs économiques. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter notre article détaillé sur la Corporate Sustainability Reporting Directive.
La CSRD impose aux entreprises un niveau de transparence renforcé dans la diffusion de leurs informations ESG, en s’appuyant notamment sur le cadre des normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards). Elles doivent démontrer de manière lisible et structurée l’avancement de leur trajectoire de transition, en veillant à éviter toute communication trompeuse ou assimilable à du greenwashing. Pour assurer la crédibilité de ces publications, il est essentiel de s’appuyer sur des vérifications indépendantes, afin de garantir la fiabilité des données financières et extra-financières, notamment celles liées aux risques climatiques.
La norme ESRS E1 est d'ailleurs la plus précise et exigeante sur ce point. Elle a pour objectif de permettre aux parties prenantes de comprendre comment une entreprise affecte le climat et comment le climat l'affecte en retour. Elle se structure autour de trois sous-thèmes :
L'atténuation du changement climatique (réduction des émissions).
L'adaptation au changement climatique (gestion des risques et des opportunités).
La thématique de l'énergie.
Les impacts d'un plan de transition bien mené sont multiples : il permet une réduction vérifiable des émissions sur les scopes 1, 2 et 3, une meilleure anticipation des risques climatiques et financiers, et l'ouverture à de nouvelles opportunités de marché grâce à l'innovation et à l'efficacité opérationnelle. Un plan de transition permet d'anticiper les risques liés à la transition vers une économie bas-carbone, tels que les coûts futurs liés à la taxe carbone ou les risques réputationnels. Il offre également une vision à long terme, en alignant les objectifs climatiques de l’entreprise avec sa stratégie commerciale et financière.
Toute stratégie pertinente commence par une mesure précise. Le Bilan d'Émissions de Gaz à Effet de Serre (Bilan GES ou Bilan Carbone) est le prérequis indispensable pour comprendre votre point de départ.
Cartographie des émissions de gaz à effet de serre (scope 1, 2 et 3) Il est crucial de couvrir les scopes 1 (émissions directes), 2 (émissions indirectes liées à l'énergie) et 3 (autres émissions indirectes de votre chaîne de valeur). Souvent sous-estimé, le Scope 3 représente la majorité de l'empreinte carbone et constitue donc un levier de réduction majeur.
Identification des processus et des postes à fort potentiel de réduction Il s'agit d'identifier les zones de votre activité où les réductions d'émissions seront les plus significatives et les plus efficaces.
Évaluation de la maturité RSE et de la gouvernance interne Avant de se lancer, il est important d'évaluer la maturité de votre organisation sur les sujets RSE.
Chez ClimateSeed, nous vous accompagnons dans la réalisation de ce bilan, en garantissant sa conformité avec les standards internationaux de référence comme le GHG Protocol ou la méthode française du Bilan Carbone® (BEGES Réglementaire).
Une fois votre empreinte mesurée, vous devez définir une destination. Vos objectifs de réduction doivent être ambitieux et crédibles.
L'initiative Science Based Targets (SBTi) est une référence mondiale pour valider que les objectifs des entreprises sont alignés avec les dernières données de la science climatique, visant une trajectoire de réchauffement de 1,5°C ou "bien en dessous de 2°C". Les ESRS indiquent que les objectifs doivent être basés en priorité sur une méthodologie de décarbonation sectorielle si elle existe et si ce n’est pas le cas, sur une méthodologie de décarbonation absolue. Pour ce faire, l'entreprise doit suivre un cadre méthodologique basé sur l'Accord de Paris, souvent en se référant au référentiel SBTi ou au scénario Net Zero de l'Agence internationale de l’énergie (AIE).
Il est essentiel de définir des cibles intermédiaires, par exemple à l'horizon 2030, pour rendre votre plan d'action pilotable. Après 2030, les valeurs cibles sont fixées tous les 5 ans, c'est-à-dire pour 2035, 2040, 2045 et donc 2050.
Cette étape doit intégrer une dimension financière, en évaluant les budgets nécessaires, les leviers d'investissement vert et le retour sur investissement de vos futures actions. L'entreprise doit indiquer les ressources financières et humaines allouées à la mise en œuvre de son plan, incluant les dépenses d'investissement (CapEx) et opérationnelles (OpEx). Elle doit relier ces dépenses aux postes pertinents dans les états financiers.
Cette étape consiste à traduire vos objectifs en actions concrètes. Les chantiers sont variés et dépendent de votre secteur d'activité.
Énergie: améliorer l'efficacité énergétique de vos processus, passer à des contrats d'électricité 100% renouvelable.
Mobilité: mettre en place une politique de voyage favorisant le train, électrifier votre flotte de véhicules et encourager le covoiturage.
Supply chain: engager vos fournisseurs dans une démarche de réduction, privilégier les achats durables et les circuits courts.
Bâtiments: planifier la rénovation énergétique de vos locaux.
L'entreprise doit lister les leviers de décarbonation, les décrire, quantifier leur contribution individuelle à la trajectoire et indiquer l'horizon de leur déploiement.
Le succès de cette phase repose sur un suivi rigoureux des projets à l'aide d'indicateurs de performance (KPIs) clairs.
Un plan de transition ne peut réussir s'il n'est pas porté au plus haut niveau. La gouvernance est essentielle pour sa mise en œuvre et son pilotage.
Cela peut passer par la création d'un comité climat ou le rattachement du sujet à la direction générale, avec des rôles et des responsabilités bien définis.
Un reporting interne régulier est nécessaire pour suivre les progrès, identifier les écarts et ajuster la trajectoire si besoin.
L’entreprise doit définir des indicateurs de performance pour évaluer sa progression, tels que les émissions de GES totales par scope, la consommation énergétique, ou encore les investissements dans des technologies propres.
Pour réussir un plan de transition aligné aux exigences de la CSRD, il est indispensable d’allier une méthodologie solide et des outils adaptés. Voici les principaux leviers à mobiliser pour une démarche robuste et crédible :
Simulation et trajectoires de réduction : recourir à des scénarios climatiques validés pour fixer des objectifs scientifiques et cohérents avec les engagements internationaux. L'initiative SBTi (Science Based Targets initiative) est un cadre de référence mondial pour s'assurer que les objectifs de l'entreprise sont bien compatibles avec une trajectoire de réchauffement limitée à 1,5°C.
Reporting structuré et transparent : organiser la collecte et la traçabilité des données extra-financières en cohérence avec les normes ESRS , afin de produire des rapports clairs et vérifiables.
Vérification indépendante : faire appel à des audits externes pour contrôler l’intégrité des informations financières et extra-financières, et ainsi renforcer la crédibilité des publications.
Amélioration continue : mettre en place des indicateurs de performance (KPIs) et des processus de suivi réguliers pour ajuster la trajectoire si nécessaire.
Pour vous accompagner dans cette démarche, il existe des solutions logicielles qui simplifient la gestion de ces données comme la plateforme GEMS de ClimateSeed. Ces outils peuvent centraliser les informations, automatiser les calculs, modéliser différentes trajectoires de réduction et permettre un suivi en temps réel des indicateurs de performance.
Pour que votre plan de transition soit un succès, gardez en tête quelques bonnes pratiques :
Engager les parties prenantes : un plan de transition réussi est un projet d'entreprise. Formez vos équipes, communiquez sur vos ambitions et embarquez votre chaîne de valeur dans votre démarche.
Assurer la qualité des données : la crédibilité de votre plan repose sur la robustesse de vos données. Privilégiez les données physiques et primaires et assurez-vous de la traçabilité de vos calculs. Faire vérifier votre bilan par un tiers est un gage de transparence.
Anticiper les reportings externes (CDP) : votre plan de transition est la colonne vertébrale de vos futures réponses au questionnaire du CDP. Pour en savoir plus, découvrez les 5 étapes pour préparer son formulaire CDP.
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Le plan de décarbonation n'est pas une initiative isolée. Il est la pierre angulaire d'une stratégie RSE ambitieuse et doit s'intégrer pleinement à la stratégie globale de l'entreprise. En alignant vos objectifs climatiques avec vos objectifs économiques, vous renforcez votre résilience, stimulez l'innovation, maîtrisez les risques et améliorez votre attractivité auprès des investisseurs, des clients et des talents. Cette approche s'inscrit plus largement dans la construction d'une performance ESG (Environnementale, Sociale et de Gouvernance) solide et pérenne.
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