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Normes ESRS : comprendre les standards de durabilité

Rédigé par ClimateSeed | 17 sept. 2025 14:40:09

Face à l'urgence climatique et à la pression croissante des parties prenantes, les entreprises doivent désormais intégrer la durabilité au cœur de leur stratégie. La directive sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD) est un pilier de cette transformation, et les normes européennes d'information sur la durabilité (ESRS) en sont le mode d'emploi. Ces normes visent à standardiser le reporting de durabilité pour le rendre plus transparent, comparable et fiable. Ce guide complet vous aidera à comprendre et à mettre en œuvre les normes ESRS. Pour en savoir plus sur la CSRD, vous pouvez consulter notre article dédié : Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) : le guide complet pour tout comprendre

Présentation des normes ESRS

Contexte réglementaire : lien entre CSRD et EFRAG

La CSRD, qui remplace l'ancienne directive sur la publication d'informations non financières (NFRD), élargit considérablement le champ des entreprises soumises à l'obligation de reporting de durabilité. Elle impose un cadre de reporting plus strict et harmonisé, basé sur le principe de "double matérialité", qui oblige les entreprises à communiquer des informations détaillées sur leurs risques, opportunités et impacts en matière de durabilité. Les normes ESRS, qui sont au cœur de la CSRD, ont été développées par l'EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group), un organisme indépendant qui rassemble différentes parties prenantes. L'EFRAG a été mandaté pour fournir des conseils techniques à la Commission européenne sous la forme de projets de normes.

Objectifs principaux : transparence, comparabilité et fiabilité du reporting durable

Les normes ESRS poursuivent trois objectifs principaux :

  • Transparence : les ESRS exigent des entreprises qu'elles fournissent des informations détaillées et standardisées sur leurs performances en matière de durabilité. Cela permet aux parties prenantes de mieux comprendre comment les entreprises gèrent les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).

  • Comparabilité : en standardisant les informations à fournir, les ESRS permettent de comparer les performances des entreprises d'un même secteur ou de secteurs différents. Cette comparabilité est essentielle pour les investisseurs, les régulateurs et les autres parties prenantes qui souhaitent évaluer et comparer les entreprises sur la base de critères de durabilité.

  • Fiabilité : les informations publiées dans le cadre des ESRS doivent être vérifiées par un auditeur ou un organisme tiers indépendant, ce qui garantit leur fiabilité. Cette exigence de vérification renforce la crédibilité des rapports de durabilité et la confiance des parties prenantes.

Définitions clés : durabilité, ESG, matérialité et périmètre de déclaration

Pour bien comprendre les normes ESRS, il est essentiel de maîtriser certaines définitions clés :

Durabilité : la durabilité est un concept large qui vise à répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Dans le contexte des ESRS, la durabilité est appréhendée à travers les trois piliers ESG.

ESG : l'acronyme ESG désigne les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. Ces critères sont utilisés pour évaluer la performance extra-financière d'une entreprise.

• Double matérialité : la double matérialité est un concept central de la CSRD et des ESRS. Elle exige des entreprises qu'elles évaluent la matérialité sous deux angles : la matérialité d'impact (comment les activités de l'entreprise affectent l'environnement et la société) et la matérialité financière (comment les enjeux de durabilité affectent la performance financière de l'entreprise).

• Périmètre de déclaration : le périmètre de déclaration définit les entités et les activités qui doivent être incluses dans le rapport de durabilité. Il est crucial d'établir une gouvernance des données solide, car les entreprises doivent se préparer à la collecte et à la gestion de nombreuses données.

Structure et contenu des ESRS

Les normes ESRS sont structurées de manière à couvrir l'ensemble des enjeux de durabilité. Elles se composent de normes générales (transversales) et de normes thématiques.

Norme générale

Les normes générales, ou transversales, s'appliquent à toutes les entreprises soumises à la CSRD, quel que soit leur secteur d'activité. Elles définissent les principes fondamentaux et les exigences de reporting communes à tous les sujets de durabilité.

• Champ d'application et principes fondamentaux (double matérialité, gouvernance) :

L'ESRS 1 "Exigences générales" établit les principes généraux pour la préparation et la présentation des déclarations de durabilité. Il ne définit pas d'exigences de publication spécifiques, mais couvre des sujets tels que les caractéristiques qualitatives de l'information, le concept de double matérialité et la structure de la déclaration de durabilité.

L'ESRS 2 "Informations générales" définit les exigences de publication générales applicables à toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d'activité, et couvre les questions environnementales, sociales et de gouvernance. Il couvre les quatre domaines de reporting : la gouvernance, la stratégie, la gestion des impacts, des risques et des opportunités, et les mesures et objectifs.

• Exigences de reporting transversales :

Les normes transversales définissent les informations que toutes les entreprises doivent fournir, indépendamment de leur analyse de matérialité.

Normes thématiques

Les normes thématiques couvrent des sujets spécifiques liés aux trois piliers ESG : environnement, social et gouvernance.

  • ESRS E (environnement) : 

    Les normes environnementales couvrent des sujets tels que le changement climatique (ESRS E1), la pollution (ESRS E2), l'eau et les ressources marines (ESRS E3), la biodiversité et les écosystèmes (ESRS E4), et l'utilisation des ressources et l'économie circulaire (ESRS E5).

  • ESRS S (social) : 

    Les normes sociales couvrent des sujets tels que les effectifs de l'entreprise (ESRS S1), les travailleurs de la chaîne de valeur (ESRS S2), les communautés affectées (ESRS S3), et les consommateurs et utilisateurs finaux (ESRS S4). Ces normes couvrent un large éventail de sujets, notamment le travail forcé, la discrimination, l'égalité des sexes et la santé et la sécurité au travail.

  • ESRS G (gouvernance) : 

    La norme sur la gouvernance, ESRS G1 "Conduite des affaires", couvre des sujets tels que la culture d'entreprise, la gestion des relations avec les fournisseurs, la corruption, l'influence politique et les pratiques de paiement.

Mise en œuvre pratique des ESRS

Obligations et échéances

  • Calendrier d’application selon la taille et la date de première publication : la mise en œuvre de la CSRD est progressive. Les grandes entreprises d'intérêt public de plus de 500 salariés, déjà soumises à la NFRD, doivent appliquer les nouvelles règles pour l'exercice 2024, avec une publication des rapports en 2025. Les autres grandes entreprises (plus de 250 salariés, plus de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires ou plus de 25 millions d'euros de total de bilan) devront publier leurs premiers rapports en 2026 sur l'exercice 2025. Les PME cotées suivront en 2027 sur l'exercice 2026. Enfin, les filiales européennes de grands groupes non européens devront se conformer à la CSRD à partir de 2029 pour l'exercice 2028.

  • Différences entre entreprises cotées, grandes entreprises et PME : la CSRD introduit des exigences de reporting différenciées en fonction de la taille et du statut de l'entreprise. Les grandes entreprises et les entreprises cotées sont soumises à des obligations plus étendues que les PME. Des normes spécifiques et simplifiées sont en cours d'élaboration par l'EFRAG pour les PME cotées et non cotées.

Seuils de matérialité

  • Méthodologie pour déterminer les enjeux significatifs : la détermination des enjeux significatifs repose sur l'analyse de double matérialité. Les entreprises doivent évaluer l'importance de chaque enjeu de durabilité à la fois en termes d'impact de leurs activités sur l'environnement et la société, et en termes d'impact des enjeux de durabilité sur leur performance financière. Des guides pratiques sur l'évaluation de la matérialité sont publiés par l'EFRAG pour aider les entreprises dans cette démarche.

  • Impacts sur la collecte et la vérification des données : l'analyse de matérialité a un impact direct sur la collecte de données. Les entreprises doivent collecter des données fiables et vérifiables pour tous les enjeux jugés matériels. La mise en place de processus de collecte de données robustes est donc essentielle pour se conformer aux exigences des ESRS. Des outils comme le logiciel GEMS de ClimateSeed peuvent aider à structurer et automatiser cette collecte.

Processus de reporting

  • Identification des sources de données ESG : l'identification des sources de données ESG est une étape clé du processus de reporting. Les entreprises doivent cartographier leurs sources de données internes (systèmes comptables, services RH, etc.) et externes (fournisseurs, partenaires, etc.) pour chaque enjeu de durabilité.

  • Implication des services internes et externalisation éventuelle : la mise en œuvre des ESRS requiert une collaboration étroite entre les différents services de l'entreprise (finance, RSE, opérations, etc.). Les entreprises peuvent également faire appel à des consultants externes, comme les experts de ClimateSeed, pour les accompagner dans ce processus complexe.

  • Audit, assurance et publication des rapports : les rapports de durabilité doivent faire l'objet d'une vérification par un auditeur ou un organisme tiers indépendant. Cette vérification garantit la fiabilité des informations publiées. Les rapports doivent ensuite être publiés dans un format électronique unique (XHTML) pour faciliter leur accès et leur analyse.

Normes sectorielles ESRS

Développement et calendrier

  • Rôle du Groupe consultatif EFRAG et phases de consultation publique : l'EFRAG est chargé de développer des projets de normes sectorielles en plus des normes générales. Ce processus de développement est un exercice pluriannuel qui implique des recherches, des consultations publiques et la validation par les organes de gouvernance de l'EFRAG. Cependant, le projet de normes sectorielles a été mis en pause en raison de la proposition "Omnibus" visant à simplifier les obligations de reporting.

  • Prévisions de publication des premiers projets début 2025 : initialement prévues pour mi-2024, la publication des normes sectorielles a été reportée à juin 2026.

Exemples de critères sectoriels

  • Secteur industriel, énergie, transport, agroalimentaire : les normes sectorielles fourniront des indicateurs et des exigences de reporting spécifiques à chaque secteur. Par exemple, pour le secteur de l'énergie, les normes pourraient se concentrer sur la transition vers les énergies renouvelables et la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pour le secteur agroalimentaire, les normes pourraient porter sur des sujets tels que les pratiques agricoles durables, l'impact sur la santé des sols et la biodiversité.

  • Adaptation des indicateurs aux spécificités sectorielles : l'objectif des normes sectorielles est d'adapter les exigences de reporting aux enjeux spécifiques de chaque secteur, afin de fournir des informations plus pertinentes et comparables.

Enjeux et perspectives

Défis de mise en conformité

  • Renforcement des compétences internes et coûts associés : la mise en conformité avec les ESRS représente un défi majeur pour les entreprises, qui doivent renforcer leurs compétences internes en matière de reporting de durabilité. Cela peut entraîner des coûts liés à la formation, au recrutement de nouveaux experts ou à l'externalisation de certaines tâches.

  • Gestion de la volumétrie et de la qualité des données : les ESRS exigent la collecte d'un grand volume de données, qui doivent être fiables et vérifiables. La gestion de cette volumétrie et de cette qualité de données est un défi de taille, qui nécessite des systèmes d'information et des processus de contrôle interne robustes. L'utilisation de logiciels spécialisés comme GEMS de ClimateSeed peut s'avérer indispensable pour gérer cette complexité.

Bénéfices attendus

  • Meilleure maîtrise des risques ESG et attractivité investisseurs : en se conformant aux ESRS, les entreprises peuvent mieux identifier, évaluer et gérer leurs risques ESG. Cela renforce leur résilience et leur attractivité auprès des investisseurs, qui sont de plus en plus attentifs aux performances de durabilité des entreprises.

  • Alignement avec les exigences des marchés financiers : les ESRS permettent aux entreprises de s'aligner sur les exigences croissantes des marchés financiers en matière de transparence et de reporting de durabilité. Cela peut leur donner un avantage concurrentiel et faciliter leur accès au financement.

Vers la seconde version des ESRS

  • Retour d’expérience, évolutions prévues et intégration de nouvelles thématiques : les normes ESRS sont conçues pour être évolutives. L'EFRAG a déjà lancé une consultation sur une version révisée et simplifiée des ESRS, suite aux premiers retours d'expérience. Ces évolutions visent à réduire la complexité des normes et à les rendre plus accessibles, tout en maintenant leur pertinence et leur alignement avec les objectifs du Green Deal européen.